AVEC 200 M$ DE CHIFFRE D’AFFAIRES réalisés l’an dernier, The Sandbox est l’un des métavers les plus populaires au niveau mondial. Créée il y a plus de dix ans par deux Français, Sébastien Borget et Arthur Madrid, la société est désormais basée à Hong Kong. La plateforme a déjà attiré plus de 300 marques au sein de son univers, telles qu’Axa, Carrefour, Adidas, Gucci ou Ubisoft. Chacune ayant acquis un terrain virtuel, appelé Land, pour communiquer avec ses utilisateurs et leur proposer de nouvelles expériences : produits exclusifs, concerts virtuels, etc. Retour sur une success-story avec Sébastien Borget, co-fondateur de The Sandbox.
La plateforme The Sandbox a été créée en 2011 avec, à ses débuts, une approche tournée vers les jeux vidéo. Comment votre stratégie de développement a-t-elle évolué ?
The Sandbox était au départ un jeu 2D pour mobile dans lequel les utilisateurs pouvaient créer et partager des expériences. Avec plus de 14 millions de téléchargements, ce jeu a connu un grand succès. Nous avons alors cherché à trouver un moyen de récompenser notre communauté. En 2017, avec l’arrivée des premières collections de NFT, telles que Cryptopunks et Cryptokitties, nous avons vu le potentiel d’enfin pouvoir créer un environnement où nos utilisateurs peuvent créer, posséder et être rémunérés pour leurs contributions. C’est alors que nous avons lancé une nouvelle version de The Sandbox, cette fois-ci en 3D et sur la blockchain, pour créer une véritable économie autour de notre écosystème.
Le développement du marché du métavers s’accroît et est très convoité, avec des acteurs américains et asiatiques aux grandes ambitions. Quelle est votre stratégie pour vous démarquer de vos concurrents et faire face au développement d’un grand nombre de plateformes de métavers ?
Le métavers ne peut exister que s’il est décentralisé. Nous cherchons à faire une plateforme ouverte pour notre communauté de créateurs et de builders, leur permettant de bénéficier du fruit de leur travail et contributions. Nous voulons donc leur apporter un maximum d’interopérabilité avec les autres plateformes. L’idée d’interopérabilité est clé pour créer un métavers véritablement décentralisé, dans lequel l’avatar de nos utilisateurs ainsi que tous ses contenus (maisons, équipements, vêtements virtuels) et sa monnaie, peuvent passer d’un écosystème à l’autre tout en gardant son identité, ses particularités et son utilité d’un environnement à l’autre de manière fluide. Plus nous sommes interopérables avec les autres écosystèmes, plus notre communauté bénéficie de leur participation dans The Sandbox. The Sandbox compte déjà 300 salariés. Comment rester une entreprise agile dans un univers en évolution permanente ? Nous travaillons déjà de manière agile, avec des ressources aux États-Unis, en Corée, au Japon, au Canada, en Argentine, en Uruguay et en France. La force de The Sandbox réside aussi dans son écosystème. Nous donnons l’opportunité à de nombreux créateurs, de toutes tailles et de tous horizons, de créer dans notre écosystème. C’est cette diversité qui rend notre structure agile et permet de répondre aux attentes de nos utilisateurs.
Comment convaincre les investisseurs de vous suivre dans vos projets véritablement disruptifs ? Quelle typologie d’investisseurs attirez-vous ?
Nous recherchons des investisseurs stratégiques qui peuvent soutenir notre vision avec leur réseau, leur portfolio et leur portée internationale. Certaines grandes entreprises, telles que Softbank, ont investi dans The Sandbox. Mais, au-delà, l’investissement dans l’écosystème de The Sandbox se fait de plusieurs manières. D’abord à travers l’achat de Land pour créer son propre univers, tel que le rappeur Snoop Dogg l’a fait avec son estate. L’investissement peut en outre ne pas être seulement financier. Beaucoup passent du temps dans la création de divers éléments et expériences, qui contribuent à ce qu’est The Sandbox aujourd’hui. Ils sont les premiers à récolter le fruit de la valeur qu’ils apportent de cette manière grâce au Web3. Comment attirez-vous les marques ? Nous permettons aux marques de se connecter avec leurs fans de manière plus créative et interactive, en se concentrant sur l’expérience. Les utilisateurs et fans des enseignes peuvent se réapproprier les contenus des marques, les mixer et les remixer avec notre game maker, sans aucune connaissance en programmation. Les marques bénéficient ainsi de l’impact et de l’engouement généré par les contenus utilisateurs (UGC). Elles sont alors susceptibles d’étendre leur univers dans le métavers.
Quels sont vos défis dans les prochains mois et les prochaines années, notamment avec l’avènement de la réalité augmentée ?
Notre but est de rendre le métavers ouvert à tous. À ce jour, les casques de réalité virtuelle ou augmentée ne sont pas accessibles au grand public. Nous nous focalisons donc d’abord plutôt sur une démocratisation du Web3 par des plateformes et appareils avec un plus fort taux d’adoption, comme les smartphones qui comptent plus de 7 milliards d’utilisateurs. L’accessibilité est clé. Chacun peut trouver une opportunité dans le métavers et y devenir un créateur, ou un joueur. Le métavers va poser des problématiques juridiques inédites. Comment comptezvous affronter ce défi et sécuriser davantage les transactions ? La plupart des problématiques associées au métavers sont en fait déjà présentes dans le Web2. Le Web3 permettra au contraire de vérifier les informations de façon sécurisée à travers la technologie blockchain. En ce qui concerne The Sandbox, nous travaillons avec plusieurs entreprises d’audit spécialisées pour constamment tester et s’assurer de l’intégrité de nos contrats. Nous avons aussi des conditions générales d’utilisation applicables par lesquelles nous protégeons les créateurs et les marques, afin de fournir un espace qui favorise la création de valeur et la créativité de tous. Que pensez-vous du Metaverse Standards Forum qui vient de se constituer, visant à favoriser l’émergence de normes permettant de rendre les différents mondes virtuels compatibles les uns avec les autres ? Pourquoi The Sandbox n’y participe pas ? Nous n’avons pas été consultés à date sur ce projet. Je pense que la standardisation des formats est une très bonne initiative pour faciliter l’interprétation et la représentation du contenu à travers les différents mondes virtuels. Mais j’estime que ce projet doit aller plus loin pour garantir une véritable interopérabilité. L’avatar doit devenir plus qu’une identité digitale : il contient aussi la réputation de l’utilisateur, quels NFTs il détient, ce qu’il a gagné, ce qu’il a revendu ou créé, tout l’historique de ses transactions sur la blockchain… Cette identité permet aussi de montrer quelles contributions l’utilisateur a amenées à la communauté. Cet environnement ouvre des accès pour des avantages et de nouvelles applications.