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Arc International retrouve un nouveau souffle

Par Houda El Boudrari

Après une restructuration à double détente en 2015 et 2017, le groupe verrier sollicite à nouveau ses actionnaires et les pouvoirs publics pour une mise au pot de 120 millions d’euros qui devrait être la dernière.


Ça y est ! Cette fois sera la bonne ! Promis juré, le feuilleton à rebondissements de la restructuration du verrier Arc International, numéro un mondial des arts de la table avec 10 500 salariés dans le monde et 939 millions d’euros de chiffre d’affaires, vient de connaître son épilogue en mars dernier. En tout cas, c’est ce que promet solennellement son nouveau patron nommé cet été, Nicholas Hodler, qui n’est autre que le gendre de Dick Cashin, patron du fonds américain PHP, l’actionnaire majoritaire du géant verrier depuis sa reprise en 2015 : « Avec l’accord agréé le samedi 23 mars, Arc se réjouit de pouvoir compter sur un financement de 120 millions d’euros, qui va permettre au groupe d’accélérer sa transformation en modernisant son outil industriel, en réduisant ses coûts opérationnels et en assurant la poursuite de sa dynamique commerciale. Arc mesure d’ores et déjà toute la responsabilité qui lui incombe désormais pour faire bon usage de ces fonds. » L’entreprise a obtenu cet accord grâce au soutien indéfectible d’un consortium de partenaires financiers internationaux mené par RDIF (Russia Direct Investment Fund, le fonds souverain russe) et CDC International Capital qui avaient déjà alimenté le groupe en 2015 et 2017. Un soutien toutefois conditionné par la décision de son actionnaire principal d’apporter de nouveaux fonds et de transformer la majorité des prêts qu’il a accordés depuis 2015, soit 55 millions d’euros, en quasi-fonds propres, montrant sa confiance dans l’avenir du groupe. Cette confiance renouvelée dont ont aussi fait preuve les différentes instances représentatives des pouvoirs publics – État, Région des Hauts-de-France et Communauté d’Agglomération du Pays de Saint-Omer – qui ont « facilité les discussions » et complété le tour de table sous forme de prêts.


Des usines qui tournent à plein régime. Car le verrier revient de loin… Surendetté, au bord du dépôt de bilan, Arc avait été cédé au fonds américain PHP fin 2014, pour un montant de 58 millions d’euros, avec l’engagement d’un plan d’investissement de 300 millions. Emmanuel Macron, alors ministre de l’économie, s’était fortement mobilisé pour la réussite de ce dossier portant sur le numéro un mondial des arts de la table et sa plus grande usine en France avec ses 5 500 salariés en activité sur le site de la commune d’Arques (Pas-de-Calais). Il a défendu bec et ongles la solution de reprise par l’américain PHP, épaulé par Bercy à hauteur de 24 millions d’euros. Mais, en forçant les créanciers à abandonner 350 millions d’euros, l’accord a quelque peu échaudé les banques qui ont fort logiquement gelé les crédits accordés au verrier. C’est ainsi que l’entreprise a dû trouver de nouvelles modalités de financement et a signé, en juin 2017, un accord avec un consortium coordonné par CDC International Capital, associant le fonds Russian Direct Investment Fund, élargi depuis à d’autres fonds souverains (Koweït, Arabie saoudite, Chine, Bahrein, Emirats arabes unis). Ce dernier a renfloué la trésorerie du groupe de 25 millions d’euros complétés par une mise de 10 millions de PHP via Glass Holding. Depuis sa reprise en main en 2015, le groupe a changé de stratégie en se positionnant sur une offre de volume plutôt que de rester cantonné à des niches premium à forte marge. Il s’est donc diversifié vers des marchés grand public, l’hôtellerie et la restauration à travers les marques Luminarc®, Arcoroc®, Arcopal®, Cristal d’Arques® Paris, Eclat®, et Chef et Sommelier®. Résultat : des usines qui tournent à plein régime avec une augmentation des volumes des ventes de près de 20 % durant les 16 mois suivant la restructuration, mais une trésorerie en tension. Dans le même temps, les attentats ont fortement pesé sur l’industrie du tourisme, l’un des débouchés importants d’Arc, ce qui a grevé ses comptes, tout comme la décision d’anticiper certains investissements.



Plan de transformation. L’appel d’air de 2017 se révélera donc bien insuffisant pour faire face au plan de transformation opérationnelle annoncé début 2019. « La poursuite de la dynamique commerciale d’Arc France nécessite de passer un cap de trésorerie en actionnant deux leviers : la mobilisation de ses investisseurs et la performance de son organisation. Notre rentabilité passe par une plus grande efficacité opérationnelle », déclarait le directeur général d’Arc International, Tristan Borne en janvier 2019, en dévoilant le plan de transformation « Synergie 2020 », nécessitant une levée de nouveaux fonds estimée à l’époque à 90 millions d’euros. Deux mois plus tard, ce montant a été revu à la hausse et fixé aux 120 millions consentis le 23 mars dernier.


Concrètement, ce plan évoque six principaux chantiers portant à la fois sur l’amélioration des process organisationnels et les conditions sociales en alignant les heures hebdomadaires de travail sur les 35 heures légales plutôt que les 32 heures héritées de l’ère précédente. La feuille de route comprend ainsi la création de « Business groups », en rapprochant les équipes Ventes, Marketing et bureau d’études Emballages afin de renforcer la capacité d’innovation et de répondre plus rapidement aux clients, la mutualisation des compétences de maintenance, la monétisation de certaines activités annexes comme l’entité AEG (Arc Engineering Group) qui développe des solutions d’ingénierie industrielle et qui devrait développer ses offres auprès de clients extérieurs. En outre, la direction prévoit également la transformation de l’organisation logistique. À la suite de la baisse de ses stocks en 2018, Arc France va ainsi procéder à la vente de certains de ses entrepôts. Une meilleure gestion de ses flux et la standardisation de ses process viendront renforcer sa performance opérationnelle. Enfin, le plan prévoit la mécanisation des opérations de conditionnement afin d’améliorer les conditions de travail sur les métiers les plus répétitifs.


Désormais, le groupe a donc les moyens d’accélérer sa transformation en modernisant son outil industriel, en réduisant ses coûts opérationnels et en assurant la poursuite de sa dynamique commerciale. Pour le mettre en œuvre, l’entreprise devait d’abord trouver un accord avec les organisations syndicales – signé le 30 janvier – et mobiliser ses partenaires financiers. C’est désormais chose faite et l’horizon s’éclaircit pour l’entreprise dont la priorité est la réussite de son plan de transformation qui comprend 108 projets couvrant tous les domaines d’activité d’Arc France. Ce plan d’envergure doit permettre au site historique du leader mondial des arts de la table d’améliorer son efficacité opérationnelle, doubler sa rentabilité en France d’ici fin 2020 et retrouver son autonomie financière.



Les chiffres clés

1825 année de création de la Verrerie-cristallerie d’Arques.

939 M€ de chiffre d’affaires en 2017.

120 M€ l’accord de financement signé en mars dernier après 4 mois de négociations.

700 postes supprimés sur les 5 200 qui existent en France.

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