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PRÉPARER L’ENTREPRISE À L’OUVERTURE DE SON CAPITAL

Pour passer à une nouvelle étape de développement de l’entreprise et soutenir sa stratégie de déploiement, le dirigeant peut prévoir l’ouverture de son capital à un ou plusieurs tiers. Qu’il soit minoritaire ou majoritaire, l’identification du bon partenaire investisseur est essentielle pour assurer un cadre de collaboration durable et ainsi créer le maximum de valeur. Mais de la décision stratégique à la signature du deal, plusieurs étapes sont à anticiper. Comment préparer son entreprise à l’entrée d’un nouvel investisseur ? Quelle transaction privilégier en fonction de son entreprise et de son stade de développement ? Quels pièges éviter ?

Marine Liboz : OFF-WORKS est une plateforme tech qui gère aujourd’hui 900 indépendants dans le marketing, la communication, l’IA Gen et le digital. Elle structure des agences de communication sur mesure, composée à 100 % d’indépendants. J’ai accompagné cette société, il y a quatre ans, au moment de la fin du Covid, pour l’aider à se repositionner sur le marché de la communication qui avait été durement frappé par la pandémie. Malheureusement, la société n’a pas eu le temps de lever et a été placée en redressement judiciaire. Je l’ai alors rachetée à la barre du tribunal il y a deux ans, avec deux business angels qui ont injecté des fonds dans la société dans le cadre de la reprise. Le redressement d’une entreprise impose de trouver du financement assez régulièrement. J’ai donc ensuite procédé à une levée de fonds auprès de plusieurs business angels pour repartir de manière saine. Il y a eu une montée en dilutif durant laquelle j’ai cédé 17 % du capital, puis une montée en non dilutif avec un accompagnement de BPIfrance, via un prêt innov, un an plus tard.

Raphaël Durand : Notre histoire est très différente. Cyprio est une société en biotechnologie qui est née d’un spin-off d’un laboratoire de l’École supérieure de physique et de chimie de Paris (ESPCI Paris – PSL). Elle fabrique, développe et vend des modèles cellulaires 3D qui sont encapsulés, permettant de tester, par exemple, une nouvelle molécule en préclinique sur un organe particulier comme le foie. Grâce à ces modèles, nous avons aujourd’hui un projet thérapeutique majeur de cartouche hépatique sur base biologique. 

Je suis rentré chez Cyprio d’abord en tant qu’actionnaire, au cours d’une levée de fonds. Après un sujet de gouvernance, j’ai pris la direction de la société, la veille du confinement. La société fait preuve d’une forte résilience depuis. Nous n’avons jamais fait de série A, nous avons uniquement levé auprès de business angels. La formation PSL a également abondé. Au total, nous avons levé environ 1,4 M€. Nous avons également été financés par du non-dilutif.

Il faut reconnaître que Cyprio a été constamment en levée de fonds, mais c’est assez courant dans le secteur de la biotech. Le temps de la recherche en biotechnologie est très long, celui des études cliniques également. Il est en outre extrêmement onéreux : on parle de plusieurs dizaines de millions d’euros ou même plus suivant le type de besoin et de traitement. Il faut donc sans arrêt être à la recherche de fonds, suivant la taille de l’entreprise et de ses projets auprès de business angels, de fonds VC et fonds de private equity.

Guillaume Fornier : Les fondateurs d’entreprises nous demandent souvent à quel moment ils doivent se poser la question de la levée de fonds et comment l’anticiper. Nos expériences démontrent qu’il faut l’anticiper au maximum et qu’en réalité les sociétés en croissance doivent se considérer en levée permanente, particulièrement dans le secteur des biotech et des deeptech qui sont des sociétés « capital intensive », requérant beaucoup d’apport de capitaux. Ces sociétés doivent se considérer en data room et sous due diligences constamment. Dès lors, il est primordial pour ces sociétés de tenir à jour et classée leur documentation sociale (y compris le pacte d’associé et engagements contractuels avec leurs salariés titulaires de BSPCE par exemple) ainsi que leurs principaux contrats commerciaux de façon à être prêts à faire un audit à tout moment.

Notre rôle de conseil juridique est également très pédagogique et nous préparons psychologiquement les fondateurs à ce qu’est réellement une levée. Car lorsque l’on fait entrer au capital un investisseur, c’est surtout sa sortie que l’on prépare et partant, en lui vendant une levée on lui vend aussi un exit

Thomas Claudel : Ce concept de levée de fonds permanente est difficile à marier avec le rôle premier de l’entrepreneur qui est de faire tourner son entreprise. Une levée réussie, c’est celle qui ne coûte pas à l’entreprise c’est-à-dire celle dans laquelle le dirigeant peut continuer à donner de son temps pour la conduire. C’est pourquoi l’accompagnement est fondamental. Le facteur psychologique et ce temps sont essentiels pour une première levée. L’équilibre est souvent plus facile à trouver lors des opérations d’ouverture du capital en minoritaire ou en majoritaire car la maturité de l’entreprise n’est plus la même. J’ai déjà vu plusieurs entrepreneurs rencontrer des difficultés à rebondir après une première levée épuisante, qui les a empêchés de faire tourner leur business en parallèle comme ils l’entendaient.

Raphaël Durand : Il faut se préparer à une opération toujours plus longue que prévu. Et même le non-dilutif ne se lève pas en un claquement de doigts. C’est autant de travail que d’aller chercher des actionnaires en equity. Sur les sujets européens, j’ai demandé à un cabinet de m’assister. Mais sur les appels à projet, j’ai été seul avec mon équipe.

Marine Liboz : Il est vrai que le travail administratif est très chronophage et très long. J’ai été accompagnée par la CCI qui a un service d’accompagnement pour aider les start-up dans leur recherche de financement. Le vrai sujet est d’être orienté sur les diverses possibilités d’investissement non dilutif.

Préparer son business plan et le faire évoluer

Raphaël Durand : Le fondateur doit anticiper, dès les phases de seed, les diverses étapes de développement de l’entreprise. Cette anticipation passe par la constitution d’un business plan et éventuellement sa revisite complète. Dans les premières années de l’entreprise, l’investisseur achète une équipe et un business plan, c’est-à-dire sa stratégie de développement.

Très souvent le business plan doit être totalement reconstruit deux ans après la création de la société, au regard de son expansion commerciale, territoriale, ses licences, etc. 

Jérémie Walch : Je remarque que dans les petites sociétés, il y a parfois un vrai sujet sur la qualité de l’information financière et sur les prévisions. En général, les experts-comptables n’ont pas le temps de s’en occuper. Les sociétés ne sont bien souvent pas dotées de responsable financier, et se tournent vers des conseils externalisés pour les accompagner dans leurs réflexions. 

Marine Liboz : Le business plan d’une start-up est un modèle un peu atypique qui doit rester très agile. Il est intéressant de l’aborder, de le travailler avec des experts ou des conseils qui ont l’habitude des mécaniques adaptées à chaque secteur. J’ai perdu beaucoup de temps à m’engager dans un business plan d’entreprise classique. Alors que je prépare aujourd’hui une nouvelle levée de fonds, normalement pour la fin de l’année, nous nous faisons accompagner, deux jours par semaine, par un CFO qui nous permet de travailler différemment, avec d’autres modularités, notre business plan. Le document de travail a d’ailleurs totalement changé entre la première et la deuxième levée, alors que notre business model a juste un peu pivoté. Aujourd’hui, nous présentons nos chiffres d’une nouvelle façon et nous les actualisons en temps réel. C’est devenu un outil de pilotage de trésorerie et je regrette de ne pas l’avoir fait dès le début.

Guillaume Fornier : Il arrive que les sociétés établissent un business plan sans s’être totalement confrontées à leur marché. Dès lors, le business plan évolue au gré des levées de fonds, avec des transformations de modèles et de lignes. La feuille de route évolue. 

Olivier Abergel : Je conseille principalement des dirigeants d’ETI. Et je remarque qu’ils se font bien souvent une idée particulière de leur business plan, estimant qu’ils sont prêts à la sortie parce que leur niveau d’Ebitda est intéressant que le core business fonctionne bien. Mais les investisseurs n’achètent pas une performance en stand alone, ils investissent pour le futur. Ils achètent une diversification, une ouverture à l’international, une politique de croissance externe. Le business plan doit donc être considéré dans une perspective dynamique.

Marine Liboz : OFF WORKS évolue dans un secteur directement impacté par l’intelligence artificielle. Or faire un business plan sur l’IA est extrêmement complexe et prend du temps. Dès lors, nos fonds propres se sont rapidement appauvris et nous n’avons pas pu demander autant à BPIfrance que ce que nous avions envisagé. 

Anticiper la suite

Guillaume Fornier : Le rapport au temps s’est fortement modifié depuis deux ans, dans un contexte de levée de fonds plus difficile. Même lorsque la start-up a plus de six mois de trésorerie devant elle, il est désormais compliqué de garantir qu’une nouvelle levée pourra se réaliser dans l’échéance. Il faut donc toujours penser au jour d’après. Quand on est en cours de série A, il convient déjà d’anticiper sa série B.

Jérémie Walch : Le dirigeant n’anticipe pas forcément ses besoins sur la durée et ne fait pas assez de plans sur les cinq années à venir. Parfois, les levées successives ont été prévues dès la première opération. Mais dans la majorité des cas, elles sont un peu subies, voire dans certaines hypothèses, les business plans ne se déroulent pas comme prévu et il convient de revenir autour de la table plus tôt qu’anticipé.

Marine Liboz : En tant que dirigeante, j’ai longtemps pensé qu’il valait mieux attendre l’année d’après pour lever un peu plus, fort d’une meilleure valorisation de la société. Mais au final, ce travail est si chronophage que je me demande s’il ne faut pas mieux lever un peu plus au début pour avoir davantage d’aisance.

Olivier Abergel : Bien souvent, les dirigeants méconnaissent l’investissement humain que représente une levée de fonds. Il est encore plus amplifié dans une opération de LBO, notamment dans un contexte récent de crise au cours duquel nombre d’opérations ont été avortées. Aujourd’hui, les opérateurs demeurent très vigilants et les dirigeants peuvent se retrouver dans une situation où, après avoir investi beaucoup de temps et d’argent dans des conseils, l’opération ne se fait pas. C’est un investissement vain. 

Thomas Claudel : Il y a des impondérables dans tous ces processus de croissance. La plupart des process durent aujourd’hui trois à six mois. Durant cette période, les dirigeants partent bille en tête, avec beaucoup d’enthousiasme, mais il y a une dimension psychologique à anticiper. L’opération est certes financière et commerciale, mais il ne faut pas négliger le facteur humain qui est d’ailleurs encore plus important dans une opération mid ou large cap, où il y a généralement un réinvestissement et un cash-out et donc un aspect patrimonial très fort. Toute une programmation patrimoniale est à mettre en place, avec diverses options qui doivent être considérées en amont.

Olivier Abergel : La relation avec l’investisseur a une dimension psychologique très importante. À l’occasion d’une opération primaire, les dirigeants se font un certain nombre d’a priori sur les relations avec les investisseurs, pensant qu’ils vont peut-être perdre leur liberté et la gouvernance. En réalité, le bon investisseur, notamment dans le cadre de discussions préliminaires, sera celui qui sera capable de faire un travail d’évangélisation du dirigeant expliquant qu’il ne veut pas imposer les décisions, mais qu’il cherche d’abord de la visibilité pour anticiper sa sortie dans les meilleures conditions possibles. Dans ce cadre, le reporting sera essentiel. Que ce soit côté investisseurs ou fondateurs, un beau deal se prévoit à l’achat.

Les étapes du deal

Olivier Abergel : Il faut choisir les bons conseils de place, en premier lieu une banque d’affaires rompue aux pratiques de marché et aux codes des opérations. Elle va en général confirmer une intention et la nature même du projet : une opération minoritaire ou majoritaire ? Un deal sponsorless ou pas ? N’est-il pas plus opportun de se positionner d’abord à l’achat ? Le conseil va accompagner le dirigeant à affiner sa réflexion.
Il conviendra ensuite d’affiner la documentation, la data room, réaliser les vendor due diligences visant à présenter la mariée sous son meilleur jour, pour ensuite aller rencontrer les différents candidats acquéreurs.

Thomas Claudel : N’oublions pas la réflexion patrimoniale à anticiper pour que l’opération soit une réussite sur tous les plans. Plusieurs mécaniques patrimoniales sont très intéressantes, comme, par exemple, le pacte de Dutreil qui est un outil de transmission très puissant mais qui se marie très mal avec certaines opérations sur le capital.

Raphaël Durand : Dans une ETI, les dirigeants ont souvent plus de moyens et peuvent se permettre d’être accompagnés par des conseils juridiques et fiscaux qui les guident dans ces étapes y compris pour la négociation de leur management package. Dans le cadre du développement d’une start-up, la situation est bien différente. Le dirigeant est au four et au moulin, il n’anticipe jamais assez les besoins futurs. Son business plan est fondateur dans sa réflexion. Il doit projeter la stratégie de développement de société à huit ans, en prévoyant des phases intermédiaires de levées.

Thomas Claudel : La stratégie d’ouverture du capital sur le long terme doit être désacralisée. Le fondateur n’est pas obligé de savoir ab initio s’il va ouvrir le capital de son entreprise dans un cadre majoritaire ou minoritaire, s’il va la garder dans son cercle familial ou la céder... Tout peut évoluer avec le temps, au regard des dynamiques de marché et même de ses envies personnelles.

Marine Liboz : Il m’a semblé compliqué de savoir vers quels conseils me tourner au démarrage de la structure. Est-ce un expert-comptable, un conseil juridique, un fiscaliste ? Quand on crée son entreprise, on choisit d’abord un statut, puis après on réfléchit où placer ses parts. Ces questions-là sont abordées trop tard par le dirigeant, alors que le modèle de démarrage peut avoir d’importantes répercussions sur le futur. 

Évidemment, quand le fondateur monte sa société, il ne réfléchit pas encore à sa sortie. Mais elle peut arriver plus vite que prévu. Or un certain nombre de structures juridiques imposent un délai de détention de parts. Il faut donc anticiper la modélisation et la structure même de l’entreprise.

Olivier Abergel : Lorsqu’il rencontre d’éventuels partenaires, le dirigeant doit mener des négociations autour de trois axes. D’abord la valorisation, avec le prix et la rétrocession de valeur le cas échéant. Il convient également de discuter la gouvernance et la latitude du dirigeant par rapport à l’investisseur, même si je rappelle que les fonds sont vigilants à ne pas être trop hands on. Il faut parler du business plan et comment il va se réaliser, du projet de l’entreprise et de la cohabitation. Enfin, l’horizon de sortie du fonds doit être abordé et prévu. 

Autre élément de considération à prendre en compte : la nationalité de l’investisseur. En small et midcap, le private equity est un environnement assez domestique. Les opérations se réalisent souvent avec des fonds français, qui ont eux-mêmes de LP’s majoritairement français. Plus la taille du deal ou du ticket augmente, plus s’invitent à la table des négociations des fonds internationaux. Or à la faveur des divers changements politiques, l’État français manifeste désormais une volonté souverainiste et souhaite contrôler au maximum les opérations financières avec des fonds étrangers, particulièrement dans certains domaines stratégiques comme la santé, la défense, le digital… 

Le législateur interdit en outre les rapprochements avec des sociétés qui ont bénéficié de subventions publiques dans des pays étrangers. La compatibilité du private equity avec les pays étrangers est devenue une préoccupation majeure. 

Guillaume Fornier : Dans le domaine des start-up, le niveau de dilution doit être maîtrisé dès les premiers tours. Il nous arrive souvent de travailler avec des sociétés où les fondateurs détiennent moins de 40 % du capital au moment où ils attaquent la série A. Même s’il existe des moyens de correction, c’est déjà presque trop tard. Les fonds de venture regardent également la capacité du fondateur à maîtriser son équipe. Ils veulent voir derrière le dirigeant s’il y a un relais, si une forme de succession a déjà été prévue, si les managers ont déjà des BSPCE… Ce sont autant de lumières rouges dont il faut tenir compte avant de se présenter à des investisseurs.
La plupart des deeptech françaises qui sont actives dans des secteurs sensibles – et la liste se renforce régulièrement par décret – sont également concernées par les sujets de contrôle des investissements étrangers. Elles savent qu’elles ne pourront pas attirer aussi facilement des fonds étrangers qui auraient des problématiques de contrôle étatique au moment de l’exit.

Raphaël Durand : C’est en effet un vrai sujet dans notre secteur et une cellule se charge de la détection au ministère de la Santé, en lien avec les services de Bercy.

Marine Liboz : Il en est de même pour les partenaires avec lesquels nous travaillons. Nous sommes très proches de la French tech, et nous privilégions les start-up qui en sont issues. D’abord parce que nous sommes fiers d’en faire partie, mais aussi parce qu’il y a une entraide qui s’opère entre les équipes et les start-up de l’écosystème.

Thomas Claudel : Sur les premières levées et ouvertures de capital, un fonds rompu aux pratiques du marché français peut apporter de la simplicité au process par rapport à des fonds étrangers non implantés en France. Il peut sembler plus opportun de travailler dans un environnement familier et moins compétitif, moins challengeant, qu’avec un fonds anglo-saxon, par exemple, qui a souvent des exigences très élevées rendant le process très chronophage.

Les pièges à éviter

Thomas Claudel : Guillaume l’évoquait précédemment : un des principaux risques est d’avoir une table de capitalisation qui est dispersée avant d’entamer une opération primaire en private equity. La discipline doit être collective pour rassurer les investisseurs.

Le pourcentage de dilution des dirigeants est bien sûr fondamental à gérer car les fonds doivent être rassurés sur la volonté du dirigeant d’accompagner l’entreprise encore longtemps. Ils doivent donc avoir de l’investissement en jeu.

Olivier Abergel : De mon point de vue, il y a deux pièges qu’il convient d’éviter. D’abord, le dirigeant doit savoir capter les signaux faibles durant les négociations avec un investisseur. S’il sent que les échanges sont difficiles, manquent d’empathie et de fluidité, il ne doit pas s’embarquer avec ce candidat. Tout le monde n’est pas fait pour s’entendre et on n’est pas obligés de partager des visions d’avenir et de développement. 

En outre, il ne doit pas survaloriser son groupe. Certains banquiers d’affaires très compétents permettent à l’entrepreneur de vendre sa société à une valorisation très élevée, mais derrière il faudra l’assumer. Je rappelle que les montages sont structurés en fonction des valorisations, notamment en matière de LBO la dette est levée en fonction d’un multiple d’Ebitda. Et si les montages sont trop tendus, le risque est de se retrouver dans une situation de crise, telle que connue en 2008 ou durant la pandémie. 

Jérémie Walch : Il convient également de bien paramétrer le marketing du dossier avant de le présenter aux bonnes personnes. Le dirigeant n’a qu’une seule chance de faire une première bonne impression. Or il peut avoir une certaine déviance à présenter un projet contraint par ses capacités de financement. Il doit au contraire être offensif dans ses présentations et présenter une stratégie ambitieuse à laquelle il adossera un financement adapté.

Marine Liboz : J’ai conscience que c’est aussi par ma capacité à communiquer que j’ai pu lever des fonds. Nous accompagnons d’ailleurs un certain nombre de start-up à monter leurs dossiers de présentation, et leurs dirigeants pour apprendre à pitcher. Le media training est essentiel, ce n’est pas inné. Encore plus dans les métiers d’ingénieurs, qui ne sont pas du tout habitués à l’exercice. La confiance se travaille.

Raphaël Durand : Il me semble en effet important que l’équipe de direction se fasse coacher, car ce sont des moments où elle sera particulièrement mise au défi.

Marine Liboz : Les entreprises sont aujourd’hui plus attentives aux investisseurs qu’elles font entrer au capital, que ce soit un fonds ou un business angel. Les mauvaises expériences ne restent jamais confidentielles et sont partagées entre entrepreneurs. Avec un business angel, il faut vérifier s’il y a une synergie de métier et si cette personne peut apporter au dirigeant. Je rappelle qu’un business angel ne fait pas que donner de l’argent, la question de son rôle dans l’entreprise doit être abordée. Dans le cas d’OFF-WORKS, ils ont été de véritables accompagnateurs. 

S’agissant des fonds, nombre d’entre eux sont aujourd’hui dotés d’operating partners qui viennent soutenir le dirigeant dans son accélération en lui apportant les conseils nécessaires aux différents développements qu’il réalise. Nous sommes, nous-mêmes, operating partner du family office de la famille Afflelou et intervenons auprès de leurs start-up comme un référent en matière de communication. C’est une tendance très forte qui se développe en France et, aujourd’hui, les jeunes sociétés se dirigeront vers des investisseurs qui ne se présentent pas uniquement pour leur donner de l’argent, mais qui sauront les accompagner dans leur questionnement et dans les étapes cruciales de leur avenir.

Guillaume Fornier : Inversement, à un certain stade de maturité, certaines entreprises pourront avoir un souhait inverse, c’est-à-dire un fonds qui est principalement un relais de cash-out

Raphaël Durand : J’ajoute qu’il me semble important de ne pas se laisser dépasser par le timing. Il arrive parfois que les négociations durent très longtemps. Et le dirigeant, qui est impliqué au quotidien dans l’opérationnel, doit rester le moteur au centre des différents acteurs du deal. Charge à lui de tirer la sonnette d’alarme auprès de sa banque d’affaires lorsque les discussions durent trop longtemps. Elle pourra alors imaginer le deal autrement, revoir la valorisation, voire envisager d’autres options. Il faut être capable de faire bouger le partenariat qui peut parfois s’enliser. Tout le monde a intérêt à ce que l’opération réussisse.

Même si ce sont souvent des opérations assez confidentielles au sein des sociétés, il ne faut pas que le dirigeant s’isole. Par-delà la présence essentielle du CFO durant les négociations, il doit partager l’information et l’avancement du deal avec le management-cœur, en tout cas auprès du comex. Il n’y a rien de pire qu’un manager, impliqué dans l’opérationnel et souvent en déplacement à l’étranger, découvre l’opération à la fin et son management package sans même savoir ce que c’est. Les bonnes et même les mauvaises nouvelles se partagent.

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